En cette mi-Juin 2013, j’étais invité par le ministère danois des affaires étrangères, à assister à la conférence sur l’avenir de l’édition et l’accessibilité pour les déficients visuels et autres personnes empêchées de lire des livres imprimés, organisée par la Bibliothèque nationale danoise spécialisée dans la fourniture de services aux personnes victimes de ces handicaps et du Consortium DAISY (actif depuis 1996 dans l’action pour un égal accès à la connaissance et l’information pour tout le monde surtout les personnes empêchées de lire les imprimés). Deux jours de conférence, à Copenhague, chapeautée par le ministère danois de la culture pour débattre des problèmes liés à l’accessibilité. Un moment bien choisi et fort opportun, parce qu’il s’est tenu à quelques jours de la « Conférence diplomatique pour la conclusion d’un traité visant à faciliter l’accès des déficients visuels et des personnes ayant des difficultés de lecture des textes imprimés aux œuvres publiées« , se tenant à Marrakech du 17 au 28 juin 2013, sous l’égide de l’OMPI.
Cette rencontre de Copenhague est intéressante, à plus d’un titre pour moi, tant cette question du point de vue documentaire et bibliothéconomique, est loin d’être prise en compte au Sénégal. L’occasion était donc de profiter de cette invitation, certes pour présenter (et représenter) la profession documentaire telle qu’elle se vit localement, mais plus pour apprendre et découvrir ce qui se fait dans des pays, qui depuis longtemps ont fait de cette question intéressant le handicap visuel, une préoccupation fut-elle mineure.
Le concept « information pour tous » est souvent très limitatif dans ses applications et tentatives d’application, car il ne prend pas toujours en compte les personnes victimes de handicap, qui sont très souvent « oubliées ». Ce constat est flagrant pour mon pays (l’exemple que je connais le plus), pour preuve, il est difficile d’attester de l’existence de sections pour handicapés visuels dans les bibliothèques publiques et autres centre de lecture et d’animation culturelle, encore moins dans les bibliothèques universitaires. Hormis peut-être au sein de l’Institut National d’Education et de Formation des Jeunes Aveugles de Thiès (INEFJA) qui est le seul établissement spécialisé public du Sénégal, où l’on est en droit d’attendre ce type de service d’appui documentaire.
Les retours d’expériences reçus pendant ces deux jours, interpellent ma conscience d’acteur documentaire sur la nécessité de faire quelque chose, pour que la mission qui est nôtre, prenne une autre dimension qui soit en adéquation avec (1) la générosité qui est l’étoffe de notre métier et (2) l’extensivité de nos services aux usagers. Une tâche difficile certes, mais loin d’être impossible, il suffira avant tout d’acquérir ou développer des compétences professionnelles en adéquation avec cet environnement d’usagers particuliers. Acquérir, puis gérer documentairement d’autres supports d’information, sous d’autres formats de type audio (Documents DAISY) ou tactile (Braille) ; des dispositifs matériels et/ou logiciels (lecteurs DAISY) permettant de lire des livres à la norme DAISY. Mais aussi proposer des catalogues adaptés pour que ces usagers puissent rechercher et identifier les documents voulus, exemple de La Bibliothèque Numérique Francophone Accessible, ou de la Bibliothèque Braille romande et livre parlé (Suisse). Une tâche qui nécessitera aussi la mobilisation de plusieurs entités, à commencer par les organisations représentatives de ces personnes handicapées, celle représentative des professionnels de l’information documentaire (ASBAD), etc., qui pourraient dans une conjugaison d’efforts, asseoir une bonne politique de lobbying pour influer sur les acteurs gouvernementaux ; aller à la recherche de potentiels partenaires ; conscientiser les responsables de la structure de formation professionnelle principale du pays (EBAD), sur la nécessité d’inclure dans ses curricula des modules pour l’acquisition de compétences idoines.
Pour revenir à la conférence proprement dite, le programme proposé atteste de la richesse des débats
et de la valeur des communicateurs, aussi bien pour les séances plénières que pour les sessions spécifiques. Comment passer sous silence les interventions en plénière de Jimmy Wales, fondateur de Wikipédia ; de Ray Kurzweil directeur de l’ingénierie à Google ou encore de Michael Seadle, directeur de la prestigieuse Ecole de bibliothéconomie et Sciences de l’information de l’université Humboldt de Berlin. Mon intérêt a été plus marqué pour la présentation de Kurzweil qui, fidèle à ses théories futurologistes, prédit une hybridation prochaine entre intelligence artificielle et intelligence humaine. Tout un programme qu’il est difficile de relater fidèlement ici 🙂 !